Le Poney Fringant

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 Tolkien, l'unique?

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Sentinelle
Nain Scribouillard
Sentinelle


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MessageSujet: Tolkien, l'unique?   Tolkien, l'unique? EmptyMar 28 Jan - 13:06

Suite à notre meeting, j'ai la tête bien pleine d'infos sur Tolkien. Je m'émerveille de ses créations si fournies et si précises.
En lisant le hors-série de Lire, qui lui est consacré, j'ai été frappée, voire choquée, de le voir comparé à d'autres oeuvres, qui me semblent si dédaignables à côté de la sienne.
-Tout d'abord, Games of throne. Tout ce que j'en sais, c'est que c'est hyper sombre (rien qu'à voir les photos), hyper torride et hyper violent (je suis encore traumatisée par l'affiche avec toutes les têtes mortes). Dans le hors-série, il y a au moins cinq publicités pour ça. Si on aime Tolkien, on est censé aimer ce truc-là, qui n'a strictement rien à voir avec?
-Puis quelques allusions à Harry Potter (que je case difficilement dans la catégorie Fantasy), et d'autres oeuvres moins connues. J'aime moyennement la fantasy, et pourtant Tolkien me fascine depuis plus de la moitié de ma vie.

D'où ma réflexion hautement métaphysique: il me semble que l'oeuvre de Tolkien restera à tout jamais au-dessus des autres. Pourquoi? Un univers très bien documenté? D'autres font sentir dans le leur qu'il existe des choses en plus de l'histoire qu'ils racontent. Un style littéraire séduisant? Pourquoi pas, mais je n'ai pas l'impression que cela m'aurait suffi. Une histoire bien bâtie? D'autres le font, mais il me semble que Tolkien fait davantage que divertir le lecteur avec un récit haletant.

Bref, une chose me vient à l'esprit quand je cherche ce qui démarque Tolkien: la transcendance. Quelque chose de beau, au-delà de la pensée consciente, qui "élève l'âme".
Voilà voilà. Des remarques?
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Tinuviel
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Tinuviel


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MessageSujet: Re: Tolkien, l'unique?   Tolkien, l'unique? EmptyMar 28 Jan - 14:34

Ayant acheté aussi ce hors-série en décembre bien que je ne l'ai pas fini, je pense que la comparaison avec d'autres oeuvres découle de deux choses : soit les influences de l'imaginaire de Tolkien et on ne peut nier au contraire cette influence qui aide à comprendre où il a puisé pour créer son propre monde (je comptais d'ailleurs faire un sujet dessus avec ma lecture de La princesse légère de George MacDonald qui est l'un des "maîtres" de Tolkien et Lewis) soit l'inspiration qu'il a été pour les autres auteurs mentionnés. Et surtout que si nous aimons Tolkien, nous pouvons aussi apprécier les autres oeuvres qui font partie du genre de la fantasy qu'ils soient précurseurs ou descendants de l'oeuvre de Tolkien.

Concernant GOT, c'est sûr que si tu te fies à la série c'est un autre monde. HBO a énormément joué sur la violence et le sexe, là où les livres ont certes des moments sombres mais sont bien plus inspirés de l'oeuvre des Rois Maudits et de la Guerre des Deux Roses. Il y a donc une dimension plus politique, "réaliste", de transposition de grands faits historiques et géopolitiques dans un contexte plus fantastique. En outre, si la comparaison entre GOT et Tolkien m'a toujours semblé absurde et relever d'une comparaison entre l'Iliade et La Guerre des Gaules , soit totalement ridicule puisque l'un tiens plus du mythe (Tolkien) et l'autre d'un récit plus réaliste dans un monde fantaisiste (Martin)...Pour moi les deux oeuvres ont de fait des messages et des intentions totalement différentes donc. Reste que oui, il est difficile de ne pas parler de GOT dans un hors-série de Tolkien quand on sait que George R.R. Martin a toujours considéré Tolkien comme son modèle et qu'il voulait se dissocier des imitateurs de Tolkien en réunissant sa passion du roman historique et en tentant de présenter la véritable "brutalité" du Moyen-Age et non une pâle imitation édulcorée et médiévale de l'imaginaire de Tolkien (le succès de Martin tient aussi qu'il n'hésite pas à raconter une histoire qui fait fi du statut de héros. Comme dans la vraie histoire ils peuvent mourir à tout moment et les cartes sont redistribuées. Martin d'ailleurs a expliqué que si il était content que Gandalf revienne, il aurait préféré qu'il reste mort. Cela ne veut pas dire que Tolkien a tort selon lui mais cela montre la réflexion littéraire divergente derrière. Martin préfère assumer la mort d'un personnage, les difficultés et les bouleversements que cela entraîne dans le récit (ou si ils reviennent ce ne sont plus les mêmes). Tolkien a d'autres intentions et notamment par le retour de Gandalf car n'oublions pas que les autres morts de son récit restent morts, même l'armée des morts ne dure pas). L'oeuvre de Tolkien et de Martin sont différentes (pareil pour leurs intentions d'écriture) mais celle de Martin a été nourrie, avec d'autres oeuvres, par celle de Tolkien. Il est donc normal pour moi de parler de la portée de son influence et aussi de l'évolution qu'il en a découlé. Comment se distinguer après Tolkien ? Comment proposer quelque chose de différents et non une pâle copie qui va juste recopier les races sans saisir la nuance des elfes (dont la violence et le sombre n'auraient pas forcément à rougir dans le Silmarillion de certains événements du Trône de Fer)(on en parle de Maedhros accroché pendant des années au sommet de son précipice, obligé d'avoir la main tranchée et qui meurt brûlé dans le volcan avec le Silmaril ? Ou les enfants de Hurin ?), la subtilité de la race naine et de son histoire ou tant d'autres choses qui font l'identité et la force des récits d'Arda.

Ensuite les autres oeuvres mentionnées pour moi peuvent se défendre. Le cycle de Terremer est aussi écrit par une universitaire qui questionne  notre époque, l'identité et la condition humaine. En ce sens elle creuse bien plus cette condition humaine que Tolkien en la confrontant aux sciences sociales et à d'autres cultures extraterrestres ou fantaisistes. Son approche est différente mais non moins dénuée d'une certaine philosophie et beauté qui peut séduire et nous marquer.  
Il y a aussi Peter S. Beagle, injustement méconnu  en France, dont son oeuvre principale La dernière licorne a une poésie et une mélancolie dans son récit et sa plume qui transcendent, à mes yeux, par un beau plus simple qu'un divertissement.

Echantillon de citation de cette chère Licorne:

Concernant Harry Potter, on ne peut nier l'influence que Tolkien a eu sur le récit. C'est bien de la fantasy mais de la low fantasy (soit un environnement normal perturbé par une présence magique)(là où le Seigneur des Anneaux est catégorisé dans la high fantasy soit des mondes imaginaires où la magie est présente) cependant ce dernier rentre plus dans une catégorie Young Adult. Et si j'aime Harry Potter, je ne  peux le comparer à l'oeuvre du Master mais on ne peut refuser le lien entre les deux, ne serait-ce parce que JK Rowling comme Tolkien sont des chrétiens et donc influencés par leur croyance, une imagerie et une culture commune. Outre le fait que JK Rowling a aussi été influencée par le folklore britannique, Les contes de Canterbury (adoré par Tolkien et qu'il a même étudié de fond en comble), la mythologie gréco-latine (comme Tolkien), Shakespeare avec notamment Macbeth (Tolkien aussi mais c'était plus Hamlet) mais aussi Narnia (dont l'auteur avait aussi des valeurs chrétiennes mais était ami avec notre bien aimé Tolkien), T.H White, Jane Austen et tant d'autres oeuvres qu'elles soient reconnus par Rowling ou avec lesquelles on ne peut inévitablement faire la comparaison par l'influence qu'elles ont été ou par les inspirations communes de ces différents auteurs.

Je conseille d'ailleurs cet article d'analyse de Rowling et Tolkien ([Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]) et cette page wiki des influences d'Harry Potter, aussi intéressante pour les oeuvres qu'elle peut faire découvrir ([Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]).

Donc pour moi ce n'est pas choquant car ce n'est pas tant une comparaison mais bien plus une question d'influence ou d'influences communes et sur ce point je pense qu'il est vain de comparer car Le Seigneur des Anneaux, Le trône de fer, Le cycle de Terremer, Les Chroniques de Narnia, La dernière licorne, Harry Potter ou Le cycle d'Elric sont chacun des oeuvres dont les intentions de création des auteurs sont différentes et répondent à des expressions, des imaginaires et une manière de conter propre à chacun. De plus l'article "Fantasy la bibliothèque idéale" du hors-série ne fait pas "l'affront" de comparer avec d'autres oeuvres mais plutôt d'inviter les fans ou curieux de l'univers de Tolkien à découvrir d'autres oeuvres sans doute tout aussi riches ou intéressantes à lire et qui ont construit ou renouvelé, au même titre que l'oeuvre de Tolkien, l'héroic-fantasy que nous connaissons.

Cependant, il est en effet intéressant de se questionner sur la particularité même de l'oeuvre de Tolkien. Qu'est-ce qui la rend différente aux autres ? Surtout que le collectif a tendance à ne retenir que Le Seigneur des anneaux et Le Hobbit alors que l'oeuvre de Tolkien est hautement plus vaste. Pour autant comme mentionné plus haut, les autres auteurs ont été influencé par Tolkien ou influencé par des oeuvres communes (cf. Rowling avec Les contes de Canterbury, la Bible ou la mythologie britannique et antique mais on peut dire la même chose avec C.S Lewis et encore plus sachant que Tolkien et lui étaient amis et écrivaient en "même temps" leur oeuvre)...et Tolkien lui-même a été influencé. Il suffit de lire La chanson des Nibelungen pour voir de suite la comparaison ou rien qu'avec La princesse légère de George MacDonald. Et je ne parle même pas de l'auteur de Conan que Tolkien reconnaissait comme le père de la littérature fantastique ou de E.R. Eddison avec Le serpent ouroboros et dont Tolkien aurait lu toute l'oeuvre. En ce sens, Tolkien n'a rien "d'unique" puisqu'il s'est autant inspiré que ceux qui se sont inspirés de lui ou ont puisé dans les mêmes inspirations.

Mais cela ne veut pas dire que l'oeuvre de Tolkien n'a pas quelque chose qui la distingue des autres mais je pense qu'il faut nuancer et aller plus loin dans le questionnement. Notamment à travers les inspirations et les influences de Tolkien et l'influence qu'il fut lui-même sur le genre autant que les influences qu'on était les autres auteurs mentionnés sur le dit genre (mentionnés dans l'article ou dans ma réponse car il en existe bien d'autre). Outre que cette distinction viendra aussi de notre propre sensibilité et résonance avec son oeuvre...car en effet c'est une affaire de subjectivité. Bien que je pense tout à fait que l'oeuvre de Tolkien a une particularité qui la rend unique et qui, sans être à tout jamais au-dessus des autres, lui donne une place culte et incontournable dans la littérature.


Dernière édition par Tinuviel le Mar 28 Jan - 16:06, édité 1 fois
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Finduilas
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MessageSujet: Re: Tolkien, l'unique?   Tolkien, l'unique? EmptyMar 28 Jan - 16:02

Ce qui distingue Tolkien des autres auteurs? pour répondre à cette question, je vais reprendre les paroles qu'un ami me disait justement l'autre jour, parce que je suis plutôt d'accord avec lui. C'est que Tolkien à su créer un mythe.

Alors que GOT est écrit d'une façon moins mythologique, plus "terre à terre"... si on peut dire ça d'une oeuvre avec des morts-vivants. L'oeuvre de Tolkien se rapproche justement beaucoup plus de l'illiade que de GOT, pour reprendre la comparaison de Tinu. Mais je peux très bien comprendre que ces deux oeuvres soient comparés (et les autres aussi). Et je comprend aussi que certains aime les deux ou seulement l'oeuvre de Tolkien ou seulement GOT.
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Tinuviel
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MessageSujet: Re: Tolkien, l'unique?   Tolkien, l'unique? EmptyMer 29 Jan - 3:46

En relisant l'article des inspirations de Tolkien, je tiens à m'excuser auprès de lui car quand je pensais à La chanson des Nibelungen, c'était notamment à L'anneau de Nibelungen de Wagner. Or si Tolkien aimait bien l'opéra, il dépréciait l'oeuvre (et donc la comparaison) pour les inexactitudes avec les contes et mythes nordiques/scandinaves. Donc désolée cher Maître, je veillerai à ne retenir que l'épopée médiévale initiale (même si la bd Le crépuscule des dieux est très chouette)

J'ai un peu cogité hier soir sur ce qui peut distinguer Tolkien des autres auteurs et je rejoins Findui sur la notion de mythe. Tolkien a créé des langues qui sont parlées par certains, un univers, une géographie, des croyances et tout un vaste monde propre à lui mais se rapprochant des mythes gréco-latin, nordiques, britanniques ou médiévaux par sa structure et sa profondeur. Les autres oeuvres de la fantasy ont certes autant nourrie le genre, ont eu un impact et ont leur propre richesse...mais aucune n'a été jusqu'à créer un monde jusque dans les langues (le dothraki a été créé dans GOT pour la série et la vidéo de Linguisticae expliquait que les mots créés par Martin dans ses livres n'étaient pas structurés grammaticalement comme le ferait un linguiste). Je pense qu'en terme de mythe, ce qui peut le plus se rapprocher et être "comparé" ça serait Star Wars. Dans le sens engouement et oeuvre vaste sur plusieurs millénaires et avec tout plein de culture...Sauf qu'évidemment, la comparaison s'arrête à cet engouement et "vaste univers" puisque la saga ne repose en grande partie pour le public que par les films qui, si ils sont la vision d'un auteur, sont surtout une création plurielle avec plusieurs réalisateurs (ne parlons même pas des derniers films) et ibid pour tous les produits dérivés qui se contredisent parfois et sont surtout un patchwork de plusieurs mains et esprits comme peuvent l'être les productions Marvel et DC. Alors que Tolkien a réussi à créer tout cela par sa seule imagination, tout ce que nous lisons est de sa main (et parvenu grâce à son fils, paix à son âme). En ce sens, il peut se distinguer des autres auteurs parce qu'il a créé l'ensemble d'un monde et d'un mythe de lui-même, en étant aussi bien un passeur des oeuvres qui ont imprégné son imagination qu'un inspirateur pour les autres auteurs du genre.

Pour autant, je reste bien curieuse sur cette distinction et notamment en s'intéressant aux oeuvres ayant inspiré Tolkien. Ne serait-ce pour voir si l'influence est présente et ce qui fait que l'oeuvre de Tolkien a eu une durabilité plus forte dans l'imaginaire collectif.

Je pense aussi, Findui, que cette comparaison inévitable découle du ressenti de chaque lecteur qui va voir des similitudes ou pas selon ses goûts ou sa propre lecture. Aussi la comparaison avec GOT vient je pense du succès de la série (comme le succès des films du SDA à l'époque) et du fait que si on se fie juste au SDA et au Hobbit, la comparaison peut se faire comme ce sont des récits sur deux mondes fictifs et vaste dans leur culture et leur histoire. Sauf qu'on oublie souvent que l'oeuvre de Tolkien n'est pas seulement ces deux oeuvres. Pour autant, je considère que GOT a aussi de grandes qualités, différentes de l'oeuvre de Tolkien mais qui valent tout autant l'intérêt. C'est ensuite une affaire de goût et de sensibilité à une oeuvre comme dit Findui, car certains n'aimeront justement pas l'oeuvre de Tolkien.
Reste que pour moi, la réflexion des articles du hors-série n'était pas tant la comparaison mais plus dans la question de l'influence et que si nous aimons Tolkien, il existe d'autres oeuvres qui peuvent nous plaire dans le genre soit par son identité propre soit par les inspirations communes.
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MessageSujet: Re: Tolkien, l'unique?   Tolkien, l'unique? EmptyMer 29 Jan - 11:59

J'aurais bien répondu mais vous avez déjà tout dit beaucoup mieux que moi Smile

L'univers de G.R.R. Martin est d'une énorme richesse qui ne saurait être réduite aux affiches de la série. Pour avoir épluché tous ses écrits sur les détails de son monde, à travers une géographie très vaste et des dizaines de millénaires, il y a de quoi faire. En revanche, bien sûr, ce sont des œuvres fondamentalement différentes dans leur intention.
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MessageSujet: Re: Tolkien, l'unique?   Tolkien, l'unique? EmptyMer 29 Jan - 13:14

Merci Eä pour tes informations sur l'univers de G.R.R. Martin que je connais bien trop en surface de mon côté pour pouvoir apporter des précisions (même en résumé) comme tu le fais Very Happy (un jour je lirai tout. Un jour)(trop de livres à lire)

En revanche, mon côté historienne et mes révisions de ma question de contemporaine (Culture, médias et pouvoir (1945-1991) aux Etats-Unis et en Europe de l'ouest) m'ont fait voir sous une autre perspective (moins littéraire comme je le faisais plus haut) cette réflexion de "L'oeuvre de Tolkien au-dessus des autres ?"

Tout d'abord si Le Hobbit a eu du succès, celui-ci a surtout été littéraire et seulement en Angleterre. Il y a bien eu une tentative de traduction par les allemands mais c'était en 1938 et la politique d'édition et le contexte de guerre n'ont absolument pas incité Tolkien à publier son oeuvre en langue allemande. Donc hormis une mauvaise traduction suédoise en 1947 (la traduction française prévue dès 1937 ne verra le jour qu'en 1969 et 1976 dans La bibliothèque verte), Le Hobbit a du succès mais c'est un succès littéraire qu'il faut ancré dans l'époque (6800 exemplaires de 1937 à 1938) et dans un contexte de guerre. Parce que le livre est vite devenu introuvable à cause du rationnement du papier (il y a eu une tentative de réédition en 1942 mais autant dire que ce fut pas un succès). En 1947, les ventes sont plus convaincantes mais cela décolle vraiment avec l'engouement qui va frapper dans les années soixante avec la publication du Seigneur des Anneaux et surtout son succès durant les sixties. Parce que la sortie de la trilogie en 1954/1955 a eu un succès assez mitigé auprès des critiques à l'époque (le soutiens de C.S Lewis n'aidant pas pour certains critiques comme on tape sur le bonhomme). Et si certains saisissent l'attrait particulier de l'oeuvre, les sorties sont globalement confidentielles et on pourrait dire que le public reste de niche malgré les lectures radiophoniques. La preuve quand en 1959 on vient voir Tolkien pour une adaptation en prise de vue réelle et qui préfère le film d'animation, aucun producteur n'en veut parce que ça "n'intéresse" pas.
Tolkien a d'ailleurs écrit un quatrain plutôt amusant sur l'engouement de son oeuvre :

Le Seigneur des anneaux
Est une de ces choses :
Si vous l'aimez c'est bien
Sinon vous criez bah !

Il faut attendre en fait les années 1960-1970 pour que l'oeuvre de Tolkien connaisse le succès retentissant qu'elle a désormais parce que l'ensemble de la jeunesse et du mouvement hippie vont le reprendre pour en faire un symbole de contre-culture. Avec des slogans de contre-culture comme "Frodo Lives" ou "Gandalf president". Il y a eu des produits dérivés tel que la fameuse parodie Lord of the Ringard en 1969. Même les Beatles qui sont les rois du monde et provoquent le ras de marée beatlemania veulent en faire un film (la légende dit que Tolkien aurait dit "Barrez-vous, bande de hippies"). De quoi à faire exploser sa renommée. Ce succès populaire amène alors les studios de production à s'y intéresser et doubler l'intérêt des gens pour la fantasy et le fantastique. Cela va permettre à des auteurs comme Ursula K. Le Guin, Peter S. Beagle ou Terry Brooks d'avoir du succès dans les années 60/70. En un sens c'est grâce au Seigneur des Anneaux , mais c'est surtout grâce à l'appropriation du mouvement hippie et des étudiants américains qui recherchaient de nouvelles figures héroïques en plein sixties (Guerre du Vietnam, Civil Right, Baby-boom, libération sexuelle, politiques culturelles, Guerre Froide toussa toussa). Et Tolkien considérait ça comme un "culte déplorable" parce qu'en quelques mois, il devient mondialement célèbre et pour lui c'est une vraie tuile. Avec les dérives autour de son oeuvre que cela entraîne.
La publication américaine en 1965 du Seigneur des anneaux s'inscrit aussi dans la commercialisation et la diffusion du livre de poche beaucoup plus accessible et beaucoup moins cher (75 cents le volume aux Etats-Unis)(Richard Hoggart vous direz que c'est la culture du pauvre). Pire, il a d'abord été diffusé dans une édition pirate et quand Tolkien cherche à reprendre ses droits en publiant sa trilogie chez une autre maison d'édition...ça veut dire deux éditions sur le marché américain et trois millions d'exemplaires vendus à partir de 1968 et dans tous les campus américains. On est loin des 1500 exemplaires du Hobbit en 1937 ou des 4500 exemplaires de La communauté de l'Anneau sur le marché anglais et américain en 1954. Le mythe Tolkien est surtout né par cet engouement qui s'inscrit dans les troubles sociaux, les mutations culturelles, les idéologies des sixties et seventies avec l'émergence d'une jeunesse qui cherche des repères et construit la contre-culture, recherche la nouveauté et devient même une forme de culture à part entière (genre Salut les copains! si on veut être franchouillard. Ou les Beatles). La preuve : en 1978 on a le film d'animation de Bashki avec Le Hobbit qui a un court-métrage en 1966 (avec une diffusion dans un cinéma new-yorkais, tiens, tiens) et le téléfilm de 1977 par les réalisateurs de La dernière licorne. Sans compter la reprise et donc diffusion par les jeux de société et jeux de rôle. Bref y avait du pognon à se faire littéralement (parce que enthousiasme et intérêt). Et ça n'a été possible que grâce à la réception du public et cette contre-culture et jeunesse américaine qui se le sont appropriés.

Et je pense que sans cet engouement, Tolkien aurait eu un succès moindre. Les genres de la fantasy et du fantastique aurait évolué différemment et le succès de Tolkien aurait été peut-être plus tardif ou plus confidentiel (le succès en France a été en 1970, vingt ans après mais totalement dans cet engouement des sixties et américain). Sans doute n'aurions nous pas les films de Bashki, ceux du studio ayant fait La dernière licorne (aurions-nous d'ailleurs eu la production de ce film ? Et donc la création des studio Ghibli ?) et même les films de PJ. Dans tous les cas, je pense qu'on ne peut nier le contexte qui a permis la création de ce mythe qu'est devenu Tolkien. Parce que sinon je pense que aussi magistrale soit l'oeuvre de Tolkien, elle serait restée plus cachée. Par contre, il est intéressant de voir que sans le contexte qui a permis sa notoriété, beaucoup de choses auraient changé dans le genre de la fantasy et notre paysage imaginaire collectif. Ou bien Tolkien aurait été ce que sont Akira,  Ghost in the Shell, La planète sauvage ou Moebius pour des grands réalisateurs et créateurs de la pop-culture : de grandes références mais dont la notoriété n'est pas internationale et mainstream. Ou bien cela prouve aussi qu'il y avait au coeur de l'oeuvre de Tolkien quelque chose qui saurait résonner avec la contre-culture dans ces décennies, voir juste inévitablement avec le public. Même si ça n'a pas plu à Tolkien et lui a donné l'impression qu'on dénaturait son oeuvre.
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MessageSujet: Re: Tolkien, l'unique?   Tolkien, l'unique? EmptyLun 3 Fév - 13:42

C'est passionnant tout ça ! Very Happy Merci Tinu pour les détails
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